Canicule 


Toute l'eau ne pourrait me rafraîchir, toutes ces gouttes sans arrêt qui sillonnent au hasard une cuirasse. Les gladiatrices prenaient - elles des douches? Surement pas. Je suis la combattante la plus propre qu'il n'ait jamais existé. La plus molle aussi. Tout s'est à peine bousculé et je me déçois moi-même. Ecrire, difficile, perdue parmi mes moi. Tu t'es bien tapé la tête dans le mur jusqu'à t'ouvrir le crâne en deux  Dis le, pense le: Es tu satisfaite de ton auto destruction? De tous tes rêves qui coulent dans les siphons de ton appartement, un peu plus à chaque regard que tu fixes sur eux. Tout coule sournoisement dans ces trous noirs et ne reviendra jamais. Ecrire, rien ne t’égale ni ne t'appète.  Je veux traverser la route, être immobilisée assez de temps pour m'obliger à réapprécier de pouvoir penser.


LRF



Convalescence



pleine de gestes mal assurés et appuyés, désireux de lâcher tous ses soutiens, la convalescence de soi-même, abandonner l’hiver et laisser les feuilles tomber. Les cheveux devant les yeux on a l’air de supplier toute chose. « pitié », au bout de l’épreuve, on crie sa pitié à qui veut bien l’ignorer. On sent que ça repousse à l’intérieur de soi et c’est presque plus douloureux que la douleur elle-même car l’esprit a oublié cette sensation de vie. Quant au corps il doit retourner la chercher, loin profondément, jusqu’au plus profond des tissus mouillés qui conservent une goutte de cette sensualité vitale qui repousse doucement, égratignant millimètre par millimètre chaque obstacle physiologique.
Alors, on se relève au milieu de tout. Tout n’est qu’un violon criard, aux sons horribles et grinçants nous ordonnant de marcher sur des mollets désossés. Le travail se fait en silence, sans qu’on lui ordonne quoi que ce soit, la roue tourne sans que tu puisses la voir. Marche, un pied à côté de l’autre, un pied devant l’autre. Doucement, fragilement, caressant le sol, tes pieds fondent sur eux-mêmes pour n’être qu’une flaque qui te fait glisser droit sur l’horizon.

Il y avait ce ton précis et juste qui la retenait dans chaque geste. Il y avait ses regards performatifs qui la figeaient dans sa peau ; elle sentait soudainement toutes les coutures de ses sous-vêtements lui griffer les pores. Ses hanches et son aine la grattaient, les agrafes de son soutien-gorge lui cisaillaient la colonne vertébrale. Sa poitrine devint chaude et tendue, ses mains fourmillaient. Ses yeux ne savaient s’ils devaient pleurer ou s’amuser. La vie se réveillait à l’intérieur de son sépulcre.

REFRAIN


J'ai vu le pire tomber du ciel jusqu'à ma terre. La mort vient maintenant au milieu d'une nuit d'été, un jour fou où les lumières jouent en rondes enfantines. Nous serons toujours figés dans cette chanson éternelle de notre perte. J'ai vu les chariots rouler dans des cercles de flammes vertes et bleues, j'ai vu les démons envahirent les cœurs faibles, j'ai vu les visages fondre. Nous serons toujours coincés dans notre refrain au creux de nos corps.

Ouvre  la porte pour découvrir qu'il n'y a rien derrière


Goudronné 


C'est un cheval boiteux qui traverse un marécage
Le buste transpire d'avant en arrière  sur les tambours spirituels
Le goudronné s'avance dans les lumières et les ombres, sans pagne et sans ongles. 
C'est une danse lascive à ras de tes colliers en fer, sous ton pétrole les tatouages disparaissent. Une marche dégouttante sur les feuilles, la honte collante sur une touffe plaquée au crâne. Des yeux d’égarements se tuent. Il tombe dans sa tombe. 


L.R.F







 Boursouflé


Épaisses, spongieuses, tes paupières. Le regard rapetissé par la protubérance, tes pupilles cherchent un autre visage que le mien. De petits demi-cercles cachés par  des cils distinctement séparables,  la racine bien visible sur la peau  bouffie. Un visage devient maigre autour d'un œil joufflu. Tu te balades avec cet air tuméfié, regardant la ville à travers  deux bulbes imbibés. Derrière tes grosseurs, je vois ton cœur aux reliefs infinis, des collines et des fossés formés par les boursouflures de tes plaies.
Tout ce liquide enserré sous la peau, une envie d'y mettre une entaille, un coup net, et que tout s'écoule de toi pour t'alléger un peu. Bibendum abandonné, résigné, c'est moi, qui suis la plus désolée.

L.R.F.