NUIT 4123

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NUIT 4123




Nuit IV


Quelle perfection ! Ma main sur son cul, rond et charnu je me disais que j'aimerais faire partie de ces gens là : ceux qui sont toujours parfaits. Nus, habillés, sales, endormis, accroupis, mouillés, ils sont toujours parfaits. A l'aise avec la moindre goutte de boue qui pourrait leur tomber dans l’œil et leur égratigner la cornée. Je me demandais comment serait son cul si je le recouvrais de boue. Il brillerait à la lumière de sa lampe pourrie. Il serait moite et glissant et ma main pourrait faire des allers et retours jusqu'à son sexe à l'infini. Je lui étalerais sur les cuisses. L'arrière de ses genoux, fin et solide, serait recouverte comme on applique un onguent sur un bébé. Ses mollets durs et ses pieds osseux se rappelleraient toutes les fois, où plus petit, il traînait dans la boue au fond du jardin. Je remonterais jusqu'à son dos et j'irais directement à sa nuque que je rêve de figer pour mon désir sans satiété. Je l'emprisonnerais. Je mélangerais ses cheveux à mes doigts sales et je le retournerais pour l'aveugler. Il ne verrait plus mon insignifiance et son ventre parfaitement fourni en poil et en nombril ne respirerait que pour mes mains sur son sexe. Que pour ma main-bouche.
Il s'est réveillé. Son cul me tourne le dos et il me regarde. Je sais qu'il ne sait pas quoi me dire. Je sais qu'il ne veut plus que je sois là, qu'il espérait déjà que je parte pendant son sommeil. Je m’en fiche, je reste. Je le regarde et je suis en admiration devant son cul. Il ne m'aime pas, il doit au moins subir quelque chose venant de moi, il me doit bien ça. Mes regards sur lui. C'est ce qu'il subira jusqu'à ce que j'ai la force de décoller ma main de sa peau. Rompre le contact. Ça me fait l'effet d'une fusillade. Tout mon buste se secoue de droite à gauche, mes genoux se déverrouillent et n'encaissent plus rien. Mes yeux tombent contre la poussière.


Nuit I

Un défilé de sourires aussi beaux et étendus les uns que les autres. L'homme le plus timide et le plus prétentieux du monde est devant moi. De temps en temps, il avance ses mains à demies ouvertes vers mes hanches, je recule, je ne veux pas qu'il me touche ici en premier. Je veux jouer, je veux être une enfant, je ne veux pas savoir ce qu'il veut, je ne veux plus savoir ce qu'est la séduction ou le sexe. Je veux qu'on s'asseye et qu'on joue par terre avec une carte, un bâton et une bouteille. Je veux faire un téléphone avec un bouchon et ne jamais réaliser qu'il sera bientôt parmi ceux qui ne m'aiment pas.
Sa chambre est banale. Ses draps aussi : d'un bleu blanchi mais propre. Le lit ne sent rien. Il se couche et dépose sa montre, ses lunettes et ses chaussettes à côté du lit. Nous sommes un couple périmé avant d'avoir couché ensemble. Il se met sous la couette, la remonte jusqu'à son menton avec ses deux mains. Sa tête dépasse, ridicule sans le reste. Risible sans tout le charme du vaisseau mère. Il ne fait rien, il me regarde en souriant. Je sais qu'il ne veut pas que je parle. J'ai dit. Je l'ai embrassé, il a mis sa main gauche dans mes cheveux en passant par mon oreille droite. Jamais on avait touché mon oreille droite en premier. Maintenant, je ne pourrais plus donner mon oreille droite à personne. Je suis venue sur lui. Je l'ai sentie bander entre mes jambes.




Nuit II

J'aurais pu lécher une statue, aussi douce, musclée et froide que lui. Son torse commençait à avoir une odeur agréable avec ma salive dessus. Il regardait les billets pour Singapour sur son téléphone. Je veux qu'il ne s’intéresse qu'à moi, qu'il ne voit que moi, je descends ma bouche sur son sexe. Il laisse son téléphone de côté. Il ne respire pas. Il ne fait plus aucun bruit. Moi, je ne peux rien entendre, je suis déjà amoureuse de ce corps parfaitement irréel. Il finit par mettre ses mains dans mes cheveux et me suit lentement. J'ai l'impression que c'est l'été, que je peux aller me baigner, que je peux sourire à la mer et embrasser salement qui je veux. Je baigne dans le désir et j'enlace ses hanches. La myriade de déception s’évanouit. Mon torse se remplit de force en laissant mes seins contre son ventre. Il veut que je revienne à la surface. Il me regarde dans le silence, il m'arrache ma culotte violemment et me tient par les épaules en m'allongeant sur le dos. Ce n'est pas bon. Il pense que c'est ça le plaisir. Ses épaules parfaites, sa peau inoffensive et son nez innocent m'ordonnent de le regarder dans les yeux alors que je mens.


Nuit III


Il me vide de ma volonté. Je ne suis qu'une petite fille devant une chocolaterie. Je suis impuissante, faible, de moins en moins certaine d'être. Je n'ai plus envie de jouer, je ne veux que le revoir, encore, derrière, au-dessus, en dessous de moi et le regarder jouir pendant des heures. Je peux faire semblant à l'infini. Sa beauté, il m'en prive. Je ne veux pas de lui, je veux sa perfection, ses paradoxes, sa chair, ses yeux et ses peurs. Je veux ses vêtements, sa famille, ses objets, son ordinateur, ses livres, ses anciennes copines, ses copains... Je veux posséder ce qu'il possède. Il peut garder son âme. Je ne veux que le dévorer.
Il se lave comme n'importe qui. Il mange comme n'importe qui. Il pense comme n'importe qui. Quel homme anodin. Seules ses manières son époustouflantes : pures, franches. Ses désirs sont banales. Ses rêves sont ennuyeux. Je veux voyager, je veux rencontrer l'amour.. blabla... Il ne se rend pas compte qu'il est déjà tout ce dont il rêve. Je me tais. Je continue à mentir, je lui dis ce qu'il veut entendre. Je patiente. Je vais bientôt pouvoir  l'admirer sans ses parasites d'homme commun.


LRF




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